De manière générale, la corruption concerne toute forme d’usurpation du pouvoir à des fins personnelles. Ainsi, toute personne qui dispose d’un certain pouvoir de décision, et l’utilise pour détourner un processus en échange d’une rétribution monétaire ou autre avantage, pratique la corruption. Cependant, il n’existe aucune définition universelle ou exhaustive de la corruption, car la notion de corruption est façonnée par le contexte politique, historique et culturel environnant. La définition des actes constituant une forme de corruption varie ainsi selon les régions du monde et dans le temps.
Cadres d’interprétation
Il existe différents cadres d’interprétation de la corruption :
- Du point de vue étymologique, le mot « corrompre » vient du latin « corrumpere », qui signifie détériorer, physiquement ou moralement, briser. Cette perspective, qui renvoie à la perte d’intégrité et de valeur morale, est fortement liée aux normes et valeurs d’un individu ou d’une communauté. Elle est donc sujette à interprétation, selon ce qui est perçu comme étant « bien » ou « mal », valeur qui peut varier d’une localité à une autre. Par exemple, il est courant dans de nombreux pays d’offrir des « cadeaux » à des agents de l’Etat en guise de remerciement, pratique qui interprétée dans d’autres pays comme une forme de corruption.
- Du point de vue juridique, seule les infractions définies comme acte de corruption par le cadre légal et réglementaire d’un pays sont reconnues, et peuvent ainsi faire l’objet de poursuites. Les malversations, fraudes ou extorsions, sont le plus souvent assujetties aux lois. Cependant, une définition légale stricte peut omettre certaines formes de corruption telles que le népotisme, le favoritisme, ou l’abus de pouvoir, qui sont souvent mal ou aucunement définies par la loi.
- Le point de vue de la gouvernance définit la corruption en se penchant sur la vulnérabilité des institutions et des systèmes d’un pays. Cette perspective suggère que la corruption est l’expression d’un défaut de gouvernance, notamment à travers l’absence de redevabilité, de transparence et d’intégrité, ainsi que l’existence de monopoles ou de marges de manœuvre dans le processus de prise de décision.
Par ailleurs, certaines définitions limitent la corruption au secteur public, tandis que d’autres reconnaissent que l’usurpation de pouvoir concerne également le secteur privé.
Formes de corruption
La corruption « passive », qui représente le fait de recevoir un cadeau, de l’argent, un avantage, se dissocie de la corruption « active », qui implique d’offrir ou de chercher à obtenir de l’argent ou un avantage en échange de services rendus. Les rôles peuvent s’alterner selon la situation. La personne qui soudoie, c’est-à-dire qui effectue le paiement contre service, peut aussi bien être la partie active, si elle prend l’initiative de corrompre, que passive, si un paiement est exigé. Il existe aussi la corruption « discrète », qui constitue le manquement des fonctionnaires au devoir de fournir les biens ou services financés par les administrations publiques. Un exemple de corruption discrète serait l’absentéisme d’un enseignant payé par l’Etat. On distingue également la corruption occasionnelle, souvent appelée corruption « mineure », de la corruption systémique, ou « majeure ». La corruption occasionnelle implique le paiement de petits pots-de-vin ou frais de facilitation pour l’obtention d’un service public. Cette forme de corruption est très répandue dans les pays en voie de développement, et bien que les sommes versées soient assez modestes, elle affecte de manière disproportionnée les tranches les plus pauvres et les plus vulnérables de la population, pour qui de tels montants ont un impact certain sur leur bien-être. La corruption systémique, quant à elle, concerne des sommes considérables et implique en général des hauts dirigeants et décideurs des secteurs publics et privés. Elle décrit généralement une situation où la corruption fait partie intégrante du système économique, social et politique d’un pays, dominant les institutions et les processus.Dans de tels contextes, les institutions et processus sont manipulés par un groupe d’individus, et les décideurs politiques créent ou appliquent des lois pour leur profit ou bien-être personnel.
Voici les formes de corruption les plus répandues:
Formes | Descriptions |
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Les pots-de-vin | des sommes d’argent versées en vue d’obtenir un avantage ou un service, le plus souvent à des fonctionnaires pour accélérer l’exécution d’un acte faisant partie de leurs fonctions officielles (paiements de facilitation, dessous de table). Par exemple pour la délivrance d’une carte d’identité d’un permis de conduire, le dédouanement de produits, etc. |
Les commissions occultes | une forme de pot-de-vin, mais dont le paiement s’effectue après adjudication d’un marché, et non pas avant. Ainsi, un opérateur privé souhaitant obtenir un contrat promet à l’agent de l’Etat de verser la « commission » une fois que le marché lui est attribué. Les opérateurs argumentent souvent que la commission n’a pas influencé la décision, puisque le versement a été effectué après l’octroie du marché, bien que la promesse était faite avant. |
Les cadeaux | une forme non monétaire de pot-de-vin ou de commission occulte, qui peuvent parfois être interprétés comme signe de bienveillance plutôt que d’obligation de service. Ainsi, il n’existe pas toujours de provisions dans la loi contre les cadeaux, bien que ces derniers peuvent atteindre une valeur considérable. |
Les prélèvements illicites | des taxes ou droits de services, qui ont été prélevés de manière illégale. Ils ont lieu lorsqu’un agent de l’état impose une taxe sans en détenir l’autorité juridique et s’apparentent ainsi à des pots-de-vin. |
Les conflits d’intérêts | ils se manifestent lorsqu’un individu participe à plusieurs activités qui sont liées, donnant lieu à manque potentiel d’impartialité dans les prises de décisions. Par exemple, il y a conflit d’intérêts lorsqu’un agent de l’Etat octroie un marché public à sa propre entreprise. Dans ces cas, son entreprise ne devrait pas être éligible pour concourir au marché. |
La fraude | des taxes ou droits de services, qui ont été prélevés de manière illégale. Ils ont lieu lorsqu’un agent de l’état impose une taxe sans en détenir l’autorité juridique et s’apparentent ainsi à des pots-de-vin. |
Le népotisme | est le fait de favoriser des membres de sa famille dans un processus de recrutement, au dépend de la méritocratie. |
La collusion | est un arrangement entre deux partis ou plus, avec intention malhonnête de détromper un processus. La diffusion de données confidentielles sur un marché avec pour objectif de permettre à un opérateur de gagner un marché est une forme de collusion par exemple. |
Le détournement de fonds | est le vol de ressources par un employé. |
Le blanchiment d’argent | implique la circulation de fonds obtenus illégalement, et les tentatives effectuées pour « laver » cet argent. Il concerne également le transfert de fonds illégal visant à éviter le contrôle des changes et/ou la détection par le fisc local. |
Comment mesurer la corruption?
Il est extrêmement difficile de mesurer la corruption, puisqu’il s’agit d’ une activité par nature secrète. Il n’existe aucune norme acceptée universellement pour mesurer la corruption, et peu de données sont fiables sur l’incidence réelle de la corruption. Or, ces informations sont importantes pour mieux cibler les programmes de lutte contre la corruption. Une mesure communément utilisée est l’Indice de Perception de la Corruption (IPC), élaboré et mis à jour par Transparency International. L’indice classe les pays en fonction du degré de corruption perçu au sein de l’administration publique et de la classe politique, la note de 10 étant réservée aux plus intègres et 0 aux plus corrompus.
Source | Indicateurs(s) employés pour mesurer la corruption | Liens |
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Economist Intelligence Unit (EIU) | La corruption au niveau du Gouvernement et des agents publics | www.eiu.com |
World Economic Forum Global Competitiveness Survey (GCS) |
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www.weforum.org |
Gallup World Poll (GWP) | Est-ce que la corruption est répandue au sein du gouvernement ? | www.gallupworldpoll.com |
Institutional Profiles Database (IPD) |
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www.cepii.fr |
Banque africaine de développement (BAD) (Policy and Institutional Assessment) | Transparence, redevabilité et corruption dans le secteur public | http://cpia.afdb.org |
Afrobaromètre (AFR) L’Afrobaromètre est un projet de recherche indépendant et non partisan qui évalue l’environnement social, politique et économique en Afrique. |
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http://afrobarometer.org/fr |
Global Insight Business Conditions and Risk Indicators (WMO) |
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www.globalinsight.com |
Asian Development Bank (ASD) Country Policy and Institutional Assessments | Transparence, redevabilité et corruption dans le secteur public | www.adb.org |
Business Enterprise Environment Survey (BPS) |
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http://data.worldbank.org/data-catalog/BEEPS |
Bertelsmann Transformation Index (BTI) Indice de transformation |
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http://www.bti-project.org/bti-home |
Freedom House Countries at the Crossroad (CCR) | Lutte contre la corruption et la transparence | http://www.freedomhouse.org/report-types/countries-crossroads |
Freedom House (FRH) | Corruption | www.freedomhouse.org |
Transparency International Global Corruption Barometer Survey (GCB) |
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http://www.weforum.org |
Global Integrity Index (GII) |
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https://www.globalintegrity.org |
IFAD Rural Sector Performance Assessment (IFD) | Redevabilité, transparence et corruption dans les zones rurales | www.ifad.org |
Latinobarometro (LBO) | Fréquence des incidents de corruption | www.latinobarometro.org |
World Bank Country Policy and Institutional Assessments (PIA) | Transparence, redevabilité et corruption dans le secteur public | www.worldbank.org |
Policital Economic Risk Consultancy Corruption in Asia (PRC) | Dans quelle mesure la corruption porte-t-elle atteinte à l’environnement des affaires pour les entreprises étrangères ? | www.prsgroup.com |
Vanderbilt University Americas Barometer Survey (VAB) | Fréquence de la corruption parmi les fonctionnaires | www.lapopsurveys.org |